Le merveilleux univers de Karolyn, signé Luguy
Réalisé par Ouest France le 27 décembre 2008
L'auteur de bandes dessinées présente les 13e et 14e album des aventures de Percevan. Leur sortie est prévue en 2009, une année qui s'annonce très riche pour Philippe Luguy.
Philippe Luguy fait partie du cercle fermé des grands créateurs de bandes dessinées dont la carrière s'inscrit dans la durée. L'auteur, qui demeure à Granville dans la Haute-Ville, nous régale avec les aventures de Percevan dont les 13e et 14e albums vont sortir aux éditions Dargaud en 2009. Une année prolifique avec le 5e album de la série Sylvio prévu en février, et une nouvelle série en octobre, « Gildwin les légendes océanes », les deux aux éditions Jos.
Mais en cette fin d'année, un nouveau héros a rejoint le monde onirique de Luguy. Il s'agit de Karolyn dont le premier album « Le château des mille diamants » est paru aux éditions Vagabondages. Un tout nouvel éditeur, Pascal Daniel, un jeune passionné de BD à qui Luguy a voulu apporter sa notoriété.
Humour et aventure.
Avec Karolyn, Luguy s'adresse aux enfants mais aussi à tous ceux qui affectionnent le monde du créateur. Un graphisme toujours aussi soigné, fouillé, coloré, encore un véritable bijou d'humour et d'aventure qui nous transporte dans le merveilleux fantastique, véritable fil rouge de toute l'oeuvre de Luguy.
L'histoire ? Pour redonner vie à Plumty, son animal favori qui vient de mourir, un petit garçon, Karolyn, flanqué de son compagnon Boulbiket, part à la recherche du château des mille diamants. À dos de licorne, Karolyn va devoir affronter des obstacles plus étranges et merveilleux les uns que les autres.
« Mon premier objectif est de distraire. On
peut amuser les lecteurs en les faisant
réfléchir », confie Luguy. Après 40 ans de
métier, le plaisir est intact. « J'ai un réel
plaisir au graphisme, à la couleur, à inventer
des histoires. » « Le pays de la
solitude », suite des aventures de
Karolyn, est prête, elle sortira en octobre.
Et Granville ? « J'ai en préparation un album
qui se déroule dans la Haute-Ville »,
confesse le Granvillais qui aime se souvenir des
maîtres qui lui « ont donné envie. Les grands
classiques : Hergé, Uderzo et Gosciny, Franquin,
Peyo, Walt Disney... ».
Beaucoup de jeunes auteurs frappent à la porte. « Il faut leur donner du temps. On
parle de consommateurs, on oublie le citoyen. On
passe parfois à côté de vrais talents si la
rentabilité n'est pas au rendez-vous de façon
immédiate. Il y a trop d'albums qui sortent, les
lecteurs ne s'y retrouvent plus. Autrefois, un
album c'était une récompense. »
Le regard de Luguy est toujours neuf sur son
métier : « Il n'y a pas de mauvais dessins,
il y a des gens qui s'expriment. Il y a parfois
plus de force dans le trait d'un enfant que dans
un geste dit maîtrisé. »
Interview
extraite
de "Lames Vorpales" n°6 (1985)
Réalisé par Nathanaël, avec
la participation de Christian VALEIX
Philippe Luguy : [...] Les éditions Garnier font un département BD, je suis allé leur proposer Cyril (ndw
: réédité en 1989 sous le titre Karolyn chez Dargaud). Ils ont édité un album. Là
encore, grosse émotion ! Le premier album c'est quelque chose, le
sommet... D'autant plus que j'avais tout fait : dessins et textes.
J'écrivais d'ailleurs mon scénario au jour le jour. J'avais
tellement de trucs à dire que j'ai utilisé la matière de trois
albums en un seul. J'ai même dû résumer la fin du récit faute
de place.
Lames Vorpales : Un personnage nommé Cyril et un fils du même nom. Y a-t-il un rapport ?
PL : Pas vraiment. Il se trouve
que j'aime beaucoup le prénom de Cyril. C'est celui que ma femme
et moi avons choisi pour notre fils, c'est celui que j'ai choisi
pour l'un de mes personnages de papier. Au moment où je dessinais
Cyril, mon fils était tout petit.
LV : Pourquoi le second album de
Cyril, entièrement dessiné, n'est-il jamais paru ? (ndw : édité en 1990 sous le titre Karolyn chez Dargaud)
PL : C'est bête : Garnier a stoppé son département BD.
LV : Y a-t-il des références littéraires volontaires dans Cyril ?
PL : J'ai toujours voulu faire
du merveilleux, du fantastique, de l'aventure. Cette très
anglo-saxon comme démarche. Cela peut expliquer certaines
rencontres d'idées. Numa Sadoul a écrit que Cyril était un
conte initiatique à la Tolkien. Moi, quand j'ai dessiné Cyril,
je ne connaissais pas Tolkien. Depuis, je l'ai lu. Il y avait du
vrai dans les propos de Sadoul. Mais il aurait pu écrire aussi à
la Lewis Carroll. Au fond, Cyril c'est un peu Alice aux Pays des
Merveilles... C'est le même genre d'univers en un peu moins fou.
C'est aussi Peter Pan et tout ce que la littérature de
merveilleux à su créer. Mais on ne peut pas vraiment parler de références.
LV : Qu'est-ce que le merveilleux pour toi ?
PL : Le merveilleux c'est la vie. Nous vivons à la fois dans l'atroce et le merveilleux. À la
fois dans le commun et dans le fantastique. Quand tu regardes les
choses d'une certaine façon, tu t'aperçois qu'il y a toujours
dans la nature des harmonies de couleurs extraordinaires, même
dans un ciel gris. Tiens, tu as déjà regardé de près un simple
morceau de sucre ? Tous ces cristaux qui brillent, étincellent,
se renvoient le moindre rayon lumineux comme dans un kaléidoscope.
Tout cela c'est du merveilleux. Le merveilleux c'est le rêve
aussi. Mon but, dans mes BD, c'est de faire rêver les gens, de
faire retrouver un peu d'enfance aux adultes. Le merveilleux c'est
une porte ouverte sur l'impossible. Je veux dire que ça permet
d'inventer des mondes où tout est possible. L'imagination n'est
plus limitée au naturel, au quotidien. C'est une grande souplesse
au niveau des scénarios. [...]
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